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Une nouvelle économie ?

Le problème de l’humanité actuellement, c’est qu’elle applique un modèle économique qui a été conçu initialement pour 600 millions ou un peu plus. L’explication réside dans la courbe de la mortalité qui s’est modifiée, car on meurt de moins en moins sur cette terre. Une humanité qui vieillit est par définition une humanité qui consomme de plus en plus de services et de produits.

L’augmentation des classes moyennes dans le monde explique l’augmentation de la richesse générale. Le fait découle de cet élément démographique qu’il est impossible d’avoir une absence de croissance économique. 1137 millions d’humains par an créent inévitablement de la consommation en plus, des attentes en plus, des besoins en plus. Nous sommes

Nous sommes donc mathématiquement obligés à la croissance parce que l’humanité grandit. De fait, dans le nouveau modèle économique qui se dessine pour l’avenir, la valeur des services va croître de plus en plus fortement et de plus en plus vite. Ça, c’est une bonne nouvelle. Mais nous devons envisager une croissance différente avec un double défi historique avec le dérèglement climatique et l’augmentation de la taille de la population terrestre. En fait, nous sommes à l’aube de la révolution technologique de tous les temps au moment où il nous faut de changer de modèle économique.

Il n’existe pas de croisement providentiel plus incroyable que cela. Au moment où l’humanité doit inventer un nouveau modèle économique, elle a la plus grande révolution technologique de tous les temps qui commence.

Cette nouvelle révolution technologique sera aussi la première purement intellectuelle, c’est une révolution qui se fonde sur les mathématiques.

Les mathématiques seront la source de la grande valeur de croissance future. L’origine de cette nouvelle révolution économique est donc scientifique d’une ampleur absolument incalculable. Je parle ici de la mathématique des grands nombres (Big data).

. Nous allons vivre une époque formidable.

À ce jour, nos équipements digitaux (téléphones, PC, etc.) collectent énormément d’informations (Big data) et maintenant, on va pouvoir les exploiter. L’intelligence artificielle représente l’approche dominante de la nouvelle révolution technologique qui va se généraliser de plus en plus vite. Cette révolution sera aussi et surtout vecteur de décentration (décentralisation) et de rationalisation.

Jamais de tout temps la population mondiale n’a été aussi nombreuse et n’a occupé aussi peu d’espace sur terre. D’ailleurs, plus on concentre les humains dans des lieux de plus en plus réduits, plus l’ensemble de la planète devient irrespirable (lien direct avec le climat). De fait, s’il y a déconcentration, cela devrait rendre la planète plus vivable écologiquement. Clairement, le principe de la déconcentration repose sur le fait d’amener les produits et services aux consommateurs et non amener le consommateur aux produits.

Cela est une très bonne nouvelle pour l’avenir des territoires.

C’est donc bien dans les territoires que les développements et la croissance économique vont se passer. Nous entrons enfin dans l’ère de la production et du développement déconcentré.

La rationalisation, elle, deuxième caractéristique du renouveau économique et son nouveau modèle, aura pour effet de supprimer rapidement et sûrement les éléments dits de « PIB inutile », donc de production de richesse inutile (aussi nommé « croissance inutile ») telle l’obsolescence programmée des produits, les heures perdues pour des choses inutiles et improductives. Cela va impliquer un bouleversement profond de toutes les chaînes de valeurs.

Bien entendu, tout se trouble et les repères économiques traditionnels fondent comme neige au soleil. Trouble en eau profonde en effet, car comme pour toute révolution, il ne faudra plus gérer la continuité (manager), mais être dans la logique de rupture impliquant la perte de repères.

La notion de valeur sera par définition redéfinie… Qui ou quoi aura de la valeur et quelle valeur ?

Il faudra compter sur une perte de hiérarchie claire des valeurs traditionnelles. C’est une véritable et déstabilisante perte de repères qui se dessine. Que vaut un artisan, un agriculteur, un entrepreneur, un médecin, un avocat, un fonctionnaire… ? En poursuivant la logique, nous décrivons un univers de risques incroyables, un monde économique où le risque est la conséquence centrale, un risque démesuré. Aujourd’hui, notre culture nous a désappris la notion de risque et l’échec, il nous faudra le réapprendre et savoir y faire face. Il nous faudra ignorer le principe de précaution. L’essence du nouveau modèle économique et de la révolution technologique qui le porte sera l’échec à tout instant – nouveau principe économique de base -. Nous entrons déjà avec la digitalisation où le risque est permanent et permis alors que nous éduquons encore nos petits écoliers au non-risque et au non-échec.

Passer d’une civilisation de la sécurité à un univers de risque total

Le changement de modèle économique entraînera par conséquent la mort des dinosaures, c’est à dire des grandes entreprises, des groupes surdimensionnés incapables par définition d’intégrer les ruptures, les risques et les échecs et inadaptés par nature à la mutation du modèle économique.

Ce nouveau monde économique, ce nouveau modèle économique, est devant nous et il sera l’affaire de nous tous. Il aura besoin de tous les talents, de tous les savoirs, de tous ceux qui sauront faire face au risque et à l’échec, il aura besoin de nous tous. Quelle belle nouvelle, quelle belle redistribution des cartes, quel beau challenge ! Nous avons tout en France et en Europe pour réussir dans ce monde nouveau.

Jean-Luc Ginder est économiste.